Note de l'éditeur : Dr Nasser Bouchiba est président de l'Association de Coopération Afrique-Chine pour le Développement (ACCAD) au Maroc. Cet article reflète le point de vue de l'auteur et pas nécessairement celui du CGTN.
Un témoin oculaire du développement de la Chine, moteur de l'économie mondiale
En tant que « Zhongguo Tong », comme aime m'appeler mes amis chinois, j'ai eu le privilège d'étudier, de travailler et d'enseigner en Chine depuis plus de 20 ans. Pendant cette période, j'ai principalement vécu à Pékin, Guangzhou et Shenzhen. Dans ces villes, j'ai été témoin des profonds changements survenus dans la société chinoise, tant en zone urbaine qu'en zone rurale et de l'augmentation de la compétitivité internationale de la Chine dans le système mondial de commerce.
De 2009 à 2015, j'ai vécu à Guangzhou et à Shenzhen, deux grandes villes où la politique de réforme et d'ouverture a créé des opportunités sans limite pour les jeunes chinois et les jeunes venus du monde entier. Ici, la construction d'infrastructures avec le développement des talents, et l'innovation technologique avec l'industrialisation intelligente allaient de pair. Les changements étaient palpables dans tous les domaines.
Depuis mon retour au Maroc en 2016, j'ai gardé un lien très fort avec la Chine. Je me permets de partager avec vous quelques dates clés qui ont marqué mes interactions avec la Chine au cours de ces cinq dernières années.
En août 2018, mon pays le Maroc a participé en tant qu'invité d'honneur à la 25e Foire internationale du livre de Pékin qui s'est tenue au Centre international des expositions de Pékin. Durant l'évènement, j'ai annoncé la publication imminente de mon livre « Histoire des relations entre le Maroc et la Chine (1958-2018) ».
En août 2019, j'ai eu l'honneur d'être invité en tant qu'expert des groupes de réflexion à revenir à Pékin pour assister à la huitième session du Forum des groupes de réflexion Chine-Afrique et j'ai prononcé un discours lors de la cérémonie d'ouverture. La réunion a réuni des experts et des universitaires de presque tous les pays africains. Les participants ont présenté leurs visions et leurs recommandations pour renforcer la coopération sino-africaine. Nous avons eu des débats constructifs et sommes parvenus à un consensus selon lequel, le plus grand pays en développement au monde, la Chine a toujours assumé ses responsabilités envers ses partenaires, promu le multilatéralisme avec des actions concrètes et une approche pragmatique et encouragé la consolidation des échanges avec les pays africains à travers l'Initiative "la Ceinture et la Route" pour parvenir à une coopération gagnant-gagnant afin de construire une communauté mondiale du développement.
En février 2022, j'ai suivi avec beaucoup d'intérêt les Jeux olympiques d'hiver de Pékin. Pékin a offert au monde une édition inoubliable, et est devenue la première « ville olympique double » au monde à accueillir à la fois les Jeux olympiques d'été et les Jeux olympiques d'hiver. Le monde a pu témoigner des réalisations de la Chine en matière de construction d'infrastructures, d'innovation technologique, de gestion, de protection d'héritage culturel, ainsi que du maintien de l'esprit de développement pendant la période de la propagation de pandémie.
Participation à l'essor des relations entre le Maroc et la Chine
Depuis ma tendre enfance, j'ai été touché par un vieux dicton arabe qui dit que, « cherchez le savoir même en Chine ». Au début des années 1990, quand beaucoup de camarades se dirigeaient vers l'Ouest, et plus précisément vers les États-Unis et le Canada, je regardais vers l'Extrême-Orient, et plus précisément vers l'empire du milieu, la Chine. Mon objectif était très clair : maîtriser la langue chinoise et s'immerger dans la culture pour pouvoir un jour servir d'ambassadeur culturel et économique entre mon pays et la Chine. À l'université Sun Yat-sen de Guangzhou, j'ai obtenu mon doctorat en théorie politiques avec une spécialisation dans les aides chinoises pour l'Afrique.
La visite de Sa Majesté le Roi, Que Dieu L'Assiste en Mai 2016 qui était un tournant important dans ma carrière. J'ai eu le privilège de présenter en mandarin devant Sa Majesté les accords de coopération dans différents domaines, et j'ai été honoré par une réception royale le lendemain de la cérémonie de signature.
En 2016, je suis rentré au Maroc pour participer au développement de ma patrie, et d'apporter une valeur ajoutée pour le renforcement des relations bilatérales. Par la suite, nous avons créé l'Association de Coopération Afrique-Chine pour le Développement (ACCAD). Comme vous l'aurez sûrement remarqué, l'Association s'appelle Association de Coopération Afrique-Chine pour le Développement. Pourquoi l'Afrique est citée en premier ?
Permettez-moi de vous raconter une conversation que j'avais tenue avec un responsable chinois après l'inauguration d'un projet d'infrastructure. Je lui ai demandé pourquoi nous n'avions pas mis en place un programme de formation pour les jeunes ingénieurs marocains en parallèle avec l'exécution du chantier en question et réaliser ainsi le transfert de savoir-faire qui fait justement partie des avantages de la coopération avec la Chine.
La réponse fut : tout simplement on ne nous a pas sollicité de le faire.
Cette réponse très courte fut révélatrice que dans le partenariat entre l'Afrique et la Chine, la vision africaine n'est pas mise en avant par simple négligence de notre part, c'est ainsi que, après concertation avec mes collaborateurs en Afrique et en Chine, nous avons fixé la mission de notre association comme étant la formulation d'une vision africaine unifiée du partenariat avec la Chine à savoir le transfert de savoir-faire.
Aujourd'hui, nous avons pu au Maroc, et grâce au soutien des institutions marocaines dont bien sûr l'université marocaine et l'Ambassade de Chine à Rabat, à réussir un nombre de projets de partenariat, pour ne citer que quelques-uns, le projet expérimental d'agriculture saline à Erfoud, le programme d'octroi et d'évaluation des bourses d'études pour les chercheurs africains en Chine, le programme d'investissement et de transformation minière au Maroc (en cours) ou encore le programme de formation en métier de commerce électronique en partenariat avec mon université en Chine, le ministère d'Éducation et le groupe Alibaba, et qui est à sa deuxième édition cette année et est prévu pour le mois de juillet 2022.
Ces projets ont vite été remarqués par nos amis d'autre pays africains qui ont intégré les commissions de notre association pour s'en inspirer dans leurs approches avec la Chine.
Publication du livre « Histoire des Relations entre le Maroc et la Chine (1958-2018) »
Durant mes études doctorales en Chine, j'ai toujours voulu que les sujets de ma recherche soient en relation avec mon pays, le Maroc. Mais malheureusement, le manque de références était un réel handicap. C'est alors que j'ai commencé à creuser dans les archives, et j'ai pu découvrir des perles qui reflètent bien ce partenariat entre deux grandes nations, et deux grandes civilisations.
Le livre « Histoire des Relations entre le Maroc et la Chine (1958-2018) », je l'ai écrit d'abord en chinois, puisque j'avais accès aux archives chinoises et aux bases de données universitaires et médiatiques. Il y a aussi le portail du service économique en langue chinoise de l'Ambassade de Chine à Rabat, que je tiens par l'occasion à féliciter Monsieur l'Ambassadeur pour la qualité de ses publications.
J'ai ensuite traduit le livre en arabe et en français. Ces deux versions qui ont été imprimée au Maroc, et qui ont fait l'objet d'un engouement de la part des chercheurs marocains et chinois.
J'ai appris avec beaucoup de joie que plus de 50 chercheurs se sont basés sur ce livre pour achever leurs thèses d'études universitaires. C'est justement l'objectif principal derrière mon engagement dans cette aventure.
L'histoire des relations entre le Maroc et la Chine, met en évidence, le rôle important joué par feu Sa Majesté Le Roi Mohammed V et feu Sa Majesté Le Roi Hassan II, que Dieu les ait dans sa sainte miséricorde et celui du Premier ministre chinois Zhou Enlai pour établir des bases solides, viennent s'ajouter la volonté de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que Dieu L'assiste, et celle de Son Excellence le Président Xi Jinping pour promouvoir et consolider ces relations à des niveaux plus élevés pour qu'elles soient à la hauteur d'une réelle coopération, d'une solidarité diplomatique et d'un partenariat mutuellement avantageux.
Sur le plan politique, les relations bilatérales se sont toujours basées sur les principes de respect mutuel et de non-ingérence dans les affaires internes de l'un ou de l'autre.
Sur le volet commercial, et bien que le déficit commercial soit majoritairement en faveur de la Chine, "l'analyse de la structure des importations marocaines montre que le Maroc importe surtout des éléments de production tels que les machines et les équipements essentiels pour l'accélération industrielle et la modernisation de l'agriculture marocaine.
Au registre culturel, l'auteur de l'ouvrage a noté que depuis 1982, date de la signature de l'accord-cadre de partenariat culturel entre le Maroc et la Chine, les deux pays ont mis en place d'un dispositif "efficace" composé de plans d'actions renouvelés tous les trois ans, ce qui, permet une meilleure compréhension mutuelle avec des objectifs précis. Le Maroc abrite le plus grand nombre de points d'enseignement de la langue chinoise en Afrique et dans le monde arabe.
Concernant la participation du Maroc à l'Initiative « la Ceinture et la Route » (ICR), le Maroc compte parmi les premiers pays à y avoir adhéré et les résultats commencent à être visibles, notamment en matière d'investissements industriels et dans le secteur du tourisme.
Après la publication du livre en avril 2021, j'ai été honoré ainsi que ma petite famille par une lettre de félicitations de la part de Sa Majesté Le Roi, Que Dieu L'Assiste. Cette distinction royale est devenue une réelle motivation pour que je continue à œuvrer pour le rapprochement et l'échange entre notre pays et la Chine.
